23/03/2009

poète-oiseau




Je ne sais pourquoi ( de verlaine).
Tout au long du poème de Verlaine, Je ne sais pourquoi, faisant partie du recueil La sagesse, publié en 1881, on trouve le thème du poète-oiseau très fréquent au XIXe siècle. On connaît l'Albatros de Baudelaire, le pélican de Musset, un condor chez Leconte de Lisle, un cygne chez Mallarmé, voici donc la mouette de Verlaine. (Magritte, La Grande Famille, 1963)
Ce poème écrit en prison par Verlaine alors qu'il a tiré sur Rimbaud qui voulait le quitter, évoquerait, paraît-il, les traversées maritimes qu'il a faites avec lui entre l'Angleterre et la France quelques années plus tôt.
Mais on peut y lire surtout l'inquiétude du poète face à l'immensité de la nature et une identification certaine entre la démarche de la mouette, "à l'essor mélancolique", guidée par son instinct, suivant les flots, les contournant, tour à tour agressive, plaintive puis apaisée et celle de l'écrivain, dont "la pensée suit la vague", "biaisant quand la marée oblique". La part de l'animalité en l'homme et plus spécifiquement, celle de l'homme qui crée, qui cherche, s'exprime dans sa totale fulgurance ici.
Reprenant le même procédé que Baudelaire avec l'Albatros, l'assimilation de la mouette et du poète s'effectue par divers procédés. Verlaine met l'accent sur la valeur générale et symbolique de l'oiseau. La sensation auditive agressive du cri de la mouette est atténuée par la compréhension de sa plainte par Verlaine. Plainte à laquelle il s'identifie. La mouette cherche quelque chose, le poète aussi et cette quête est douloureuse. Quelque chose de perdu : même si le mot amour est prononcé.
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Je ne sais pourquoi
Mon esprit amer
D'une aile inquiète et folle vole sur la mer.
Tout ce qui m'est cher,
D'une aile d'effroi
Mon amour le couve au ras des flots.
Pourquoi, pourquoi ?
Mouette à l'essor mélancolique,
Elle suit la vague, ma pensée,
À tous les vents du ciel balancée,
Et biaisant quand la marée oblique
Mouette à l'essor mélancolique.
Ivre de soleil
Et de liberté,
Un instinct la guide à travers cette immensité.
La brise d'été Sur le flot vermeil
Doucement la porte en un tiède demi-sommeil.
Parfois si tristement elle crie
Qu'elle alarme au loin le pilote,
Puis au gré du vent se livre et flotte
Et plonge, et l'aile toute meurtrie
Revole, et puis si tristement crie !
Je ne sais pourquoi
Mon esprit amer
D'une aile inquiète et folle vole sur la mer.
Tout ce qui m'est cher,
D'une aile d'effroi
Mon amour le couve au ras des flots.
Pourquoi, pourquoi ?

Poème écrit à Bruxelles, été 1873

4 commentaires:

  1. Un bon article mais comme il est tard, je reviendrais demain pour le lire, bonne soirée, plutôt bonjour, il est quatre du matin. Je te souhaite un bon début de semaine, bises

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  2. Coucou
    De bien jolis goélands , accompagnés comme toujours d'un très joli poème .
    Bisous .

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  3. Samiamax, 4 h du matin ..oupss, tu es pire que moi toi !

    Aujourd'hui ce fut une petite journée matinale , je voulais aller ceuillir de jolie jonquille et surtout réaliser quelques photos , maintenant je vais voir si elles sont chouettes ? j'en placerais quelques unes dans ce cas.
    Bisous a toi .

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  4. Merci Romy, c'est vrai que cette poésie est assez forte d'émotion. Verlaine l'ayant composé a un moment assez pénible de sa vie.
    C'est la raison pour laquelle , j'ai placé le contexte historique.

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Merci de votre de passage .

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